Le 30 août 2024, le coup d’État au Gabon fêtera son premier anniversaire. Ce coup qui a finalement mis fin au règne de la famille Bongo a fait le tour du monde, en raison de la vidéo pathétique d’un Ali Bongo mis sous Mais parlons du coup d’État qui a tout déclenché. Le 30 août 2023, un coup d’État au Gabon a renversé Ali Bongo, fils d’Omar Bongo Ondimba, à qui il a succédé (après le décès de ce dernier) en 2009.
Bongo Père et Fils. 2005
L’ironie de la situation est qu’Omar Bongo lui-même est devenu président, après un coup d’État qu’il n’a pas organisé, en février 1964, mais qui l’a aidé à devenir président. Qui pourrait croire qu’il a été interviewé par le président français de l’époque, le général Charles de Gaulle. Bien que le coup d’état ait réussi, l’armée n’a pu conserver le pouvoir que quelques jours. Laissez-moi vous raconter cette histoire.
Le premier coup d’État enregistré au Gabon visait le premier président du pays, Léon M’ba, un homme qui avait l’habitude de fouetter les membres de son cabinet alors qu’ils étaient allongés par terre, en sous-vêtements, histoire de leur inculquer les valeurs civiques disait-il. Un type qui s’arrêtait sur le bord de la route et fouettait les gens qui ne le saluaient pas alors qu’il était dans sa voiture. Une des choses les plus pathétiques qu’il ait faites ? tenter de refuser l’indépendance de son pays et d’opter plutôt pour être une province française à l’étranger. Après que la France a refusé et lui a dit qu’il n’avait guère le choix, il a alors proposé que le Gabon utilise le drapeau français avec l’arbre national gabonais dessus. Proposition de nouveau refusée, il a fini par s’exécuter.
Leon Mba 1961
Retour au coup d’État, qui aurait été déclenché par Hilaire Mbam, un gars qui, bien que plus populaire que Mba, n’a pas réussi à obtenir le pouvoir en tant que premier président, il était détesté par l’administration française. M’ba voulait tellement qu’Obam soit exclu du parlement qu’il décida de dissoudre le parlement, provoquant une révolte d’une partie de l’armée contre son régime et sa politique. Cette décision poussa l’armée au coup d’état, dans la nuit du 17 au 18 février 1964. Le reste de l’armée était encore contrôlé par les « conseillers techniques » français toujours en place au Gabon. Le président M’ba était isolé à Lambaréné.
La France a réagi immédiatement en envoyant tout un groupe de mercenaires (essentiellement d’anciens soldats de l’armée française) et des bases militaires françaises du Tchad, du Sénégal et de la République centrafricaine pour rejoindre ceux déjà stationnés au Gabon. La réaction rapide des Français n’était pas une surprise car quelques mois plus tôt (15 août 1963) au Congo Brazzaville, un coup d’État avait eu lieu sous la présidence de Fulbert Youlou (un prêtre révoqué, qui portait des robes de prêtre de chez Dior) et dans lequel, La France n’a pas pu intervenir, n’étant pas autorisée à déployer son armée dans un pays indépendant sans une demande formelle du président via l’ambassadeur de France dans le pays.
Fulbert Youlou, 1962
Dans le cas du Gabon, M’ba n’était pas en mesure de signer une demande, et son vice-président n’était pas joignable. Le coup d’État a bien réussi, puisque les mutins ont pris la présidence et d’autres endroits clés du pays. Mais une fois dans la capitale, Libreville, l’armée française a décidé de mettre fin à la rébellion. Un soldat français a même reconnu son ancien camarade de classe gabonais de l’école militaire française (Saint Cyr) à l’intérieur du palais présidentiel. Il l’a appelé par son nom pour qu’il dépose les armes, ce à quoi le Gabonais répondit catégoriquement. Le soldat français tira sans sommation, l’armée francise se mit en mouvement et résultat : le coup d’État prit fin peu de temps après et le President M’ba fut rétabli dans ses fonctions.
Comme pour tout coup d’État raté, quelqu’un devait payer. Les participants furent emprisonnés à vie. Considéré comme l’instigateur du coup d’État, Obam fut condamné à 10 ans de prison agrémentée de fréquentes séances de flagellation tous les jours.
M’ba continua sa répression contre le peuple malgré sa lutte contre le cancer.
Ayant tiré les leçons de cette mésaventure Mba, la France fit signer par les présidents des anciennes colonies françaises, des demandes a blanc d’intervention et de déploiement de militaires français, bien rangées dans les bureaux de Jacques Foccart à Paris.
Omar Bongo and his mentor, Leon M’ba
M’ba a certes repris le pouvoir mais le grand vainqueur, ce fut Omar Bongo. La France craignait que M’ba soit devenu trop vieux pour tenir le pays, choisit Bongo comme successeur. Le jeune chef de cabinet, âgé de moins de 30 ans, fut identifié comme un successeur crédible, en raison de sa solide gestion du coup d’État.
Jacques Foccart
Pour le vérifier, il fut invité à Paris, pour un entretien d’embauche avec le président De Gaulle. Une fois approuvé pour succéder au président mourant qui était hospitalisé à Paris, le reste fut un jeu d’enfants pour ses soutiens français : ils ont juste à orchestrer une fausse élection, avec une nouvelle constitution qui avait M’ba et Bongo sur le ticket présidentiel. Bongo alors devenu vice-président, et grâce à un dernier tour de passe-passe, (du conseiller Afrique le plus connu de nombreux présidents en France, Jacques Foccart), Bongo est devenu président et est resté au pouvoir pendant plus de 40 ans.
Ali Bongo, son fils, au pouvoir depuis 2009, a été à son tour renversé en août 2023, par un coup d’État. Il a appelé les Français et ses amis du monde entier, à l’aide dans une vidéo (https://dai.ly/x8nkupf ). Mais cette fois, la France n’a pas pu intervenir, en raison de la surveillance internationale très active, et des récents coups d’état en Guinée, au Mali, au Burkina Faso et au Niger dans les mois qui ont précédé le Gabon. Maintenant à votre avis, quelle est la principale différence entre les deux coups d’état de 1964 et de 2023 ?
Suivez mon regard… jusqu’au prochain billet !
Teju